Le Haut Rhône : de Pont Carnot à Chanaz en rando-kayak sur 2 jours

Démarré par samy, 08 Mai 2018, 20:41:41

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samy

La nuit a été plutôt reposante, même si dormir n'est vraiment pas ce que je sais faire de mieux. Un tout petit peu d'humidité au matin, rien de bien gênant.


6h30 et déjà l'envie de sortir du sac de couchage.
Dans le camping, encore peu de bruit. Il y a quelques cyclotouristes, aucuns kayakistes. Il y a même un cyclotouriste en vélo couché...encore couché...


Tranquillement, j'avale un petit déjeuner à base de céréales enrichies "maison" avec noix de coco, bananes séchées, raisins, pépites de chocolats. Ca passe bien et ça cale bien le matin.


Hier soir, au moment de sortir de l'eau à 17h30, le courant dans le Rhône était en train de forcir. La cale d'accès au camping présentait tout de même une belle marche pour y accéder. Ce matin, le Rhône est plus haut d'au moins 50cm ou plus, ça débite bien, la cale est en partie sous l'eau. Il y a un courant très fortement marqué.


Aller, je plie bagage, il est 8h00, le temps de mettre le kayak à l'eau. La cale est peu protégée du courant, mieux vaut ne pas laisser le kayak filer. A l'oeil, j'évalue la vitesse du courant à 8 ou 10km/h environ, ce n'est qu'estimatif. Peut-être un peu plus en fait...
Mise à l'eau à 8h25 exactement, la reprise du courant se fait sans soucis, et c'est vitesse grand "V" que le Rhône me proposera une visite éclair et expresse de Seyssel en mode "visite de Paris à la japonnaise"... Presque pas le temps de s'occuper à prendre des photos, il faut tenir la pagaie et le kayak dans le courant et ses "rouleaux éruptifs" (j'ai trouvé cette image bien évocatrice du phénomène de brassage des eaux du Rhône à certains endroits, c'est comme cela que décrit ce phénomène Serge de Marchi dans un film amateur sur le Rhône de 1947 :  https://www.cinematheque-bretagne.fr/Exploration_Trilogie-Rhodanienne-970-15127-0-0.html . Un petit film très intéressant et instructif sur le Rhône et les modifications de son cours.


Et effectivement, il faut le maintenir en ligne le kayak au milieu de ces "rouleaux éruptifs" du vieux pont de Seyssel. Enfin, je fais surtout ce que je peux. Et Le kayak, lui, il fait plutôt ce qu'il veut, nuance... ! En fait de tenir la ligne, le résultat est plutôt une prise de courbe marquée et pas prévue du tout : après le passage du pont, les rouleaux sont tellement marqués et inévitables que malgré tous mes soins à batailler pour contrer les flots (vous savez, la gars qui se prend pour Don Quichotte...), le kayak se met à prendre sérieusement le tangente, se met à 45° sans que je n'y puisse rien, et quitte la direction voulue pendant quelques dizaines de mètres. Certes, rien de grave, rien de bien méchant, mais je me dis qu'il n'aurait mieux pas fallu qu'un obstacle quelconque se présente, je n'aurais pas pu faire grand chose.
C'est là que l'on voit les limites des capacités de navigation d'un Yakkair HP1 : ouais, ce n'est qu'un gonflable avec toute de même un comportement perfectible. Mais il ne faut pas jeter la pierre au kayak, le piètre pagayeur que je suis ne doit pas y être pour rien. Même si je pensais avoir mis quelques bons coups de pagaies, malgré tout, je pense que j'ai plutôt subi le courant. Enfin, ça fait tout bizarre subitement de ne plus rien contrôler dans la trajectoire de son kayak. Mais y'a pas d'mal, c'est l'essentiel.


A peine le temps de me retourner pour immortaliser la vue aval du vieux pont de Seyssel.


Très rapidement arrive le pont routier à haubans de la route de Paris. Lui aussi défile vite, il y a du courant... je laisse filer le kayak. Après tout, le courant me porte...

samy


Le courant aidant, le kayak (et le bonhomme dessus) avancent plutôt vite. Les bras apprécient cette remise en route tranquille pour cette seconde journée.

Le Rhône s'élargit et prend ses aises à la confluence avec le Fier, les rives s'éloignent, c'est le calme plat ce matin, quelques branches traînent par ci par la dans le courant. La visite dans le Fier, ce sera pour un autre fois.
Je longe les roselières où ont élu domicile quelques cygnes. Le paysage est calme.

Et c'est presque sans effort que j'atteins vers 9h45 le barrage de Motz, après un pagayage plutôt molasson.

Et c'est parti pour un petit portage tranquille de seulement 500m pour éviter le barrage, sur une petite portion de route bitumée qui se transforme en un petit chemin très carrossable.

samy

La mise à l'eau en aval de Motz marque l'entrée dans le vieux Rhône, un portion qui, au dires de tous, vaut le détour. Et cette portion du Rhône ne faillira pas a sa réputation.


Derrière le barrage, forcément, on retrouve un peu de courant, bien agréable. Le niveau d'eau n'est pas bien élevé malgré tout.


Après une large courbe, le Rhône entame une ligne droite assez quelconque... mais pas pour très longtemps.


Le long de la digue de Picollet, j'avance bien, tranquille. Ce n'est qu'après de longues minutes que je me rends compte d'un bruit qu'au début je n'arrive pas à déterminer (idiot que je suis !) : des travaux dans les alentours ? Une machine industrielle ? Non, non, rien de tout ça. C'est le Rhône, oui, c'est bien lui.
En effet, au loin et se rapprochant, je distingue quelques petites écumes blanches bruyantes. Tiens, c'est marrant, le seuil Tournier et de Lucey ont migré ! Mais non, mais non, restons sérieux, c'est juste le Rhône qui, avec son niveau très bas, franchit un petit seuil facile avec quelques remous. Je vois le fond. Ca passe bien, plutôt mieux à droite  d'ailleurs, le Yakkair HP1 se comporte très bien dans ce type de passage, il est très stable.
Quelques temps après, la même chose, un peu plus remuant, cela passe bien aussi, plutôt à droite encore, et cette fois je sens quand même que je frotte un cailloux, un léger déséquilibre, rien de plus, encore une fois, le comportement du Yakkair est très serein et sécurisant (au détriment d'une vitesse peu élevée, on ne peut pas tout avoir !).


Le Rhône entame alors une série de courbes et de circonvolutions du plus bel effet avec différents petits bras d'eau qui divisent la veine principale. Le niveau est bas et rend la balade magnifique, très sauvage.
J'en prend plein les yeux, je m'arrête par-ci par là, sur les blancs de sable, sur les gravières. L'eau est très limpide et claire. Il faut simplement regarder souvent loin devant soi pour repérer à l'avance les bancs de gravier où le niveau d'eau est insuffisant, même si le tirant d'eau d'un Yakkair est très faible et permet de passer presque partout même avec peu d'eau.


Qu'il est agréable de se fondre au milieu des Iles de la Malourdie. Passé 11h du matin, je décide même de m'arrêter sur la rive, un peu en aval du barrage de Chautagne (qui lui est sur le canal du Rhône), dans une grande courbe à gauche. L'envie de laisser un peu filer le temps. Parce que du temps, j'en ai. Et je ne veux pas le gâcher.
En effet, la météo pour le lendemain donne toujours de l'orage pour l'après-midi, et nous avons convenu, avec ma "super taxi-transfert-kayak-service" de nous donner rendez-vous à Chanaz à 16h30. Je n'irai pas jusqu'à Yenne cette fois, il faudra donc revenir (super l'excuse !). Alors autant profiter à fond de la journée.


Sur un grande étendue de galets, je sors le Yakkair de l'eau. J'ai des doutes quand à l'efficacité du chariot sur ce type de terrain, mais au contraire, ce sera un bon test : et ça roule, pas top, mais ça roule et je peux ainsi rejoindre dans la courbe du Rhône une zone ombragée où je peux donc protéger le kayak du soleil, KG et soleil ne faisant généralement pas bon ménage. J'en profite au passage pour sortir les quelques affaires de bivouac un peu humides du matin et les étendre pour finir de les faire sécher.
Ce n'est que vers 12h30 que je commence le picnic avec le Rhône en panorama xxl et les canards qui s'amusent à faire des concours de descentes dans la veine de courant : à celui qui arrivera le plus vite... On se croirait à la fête foraine avec des canards en bois qui défilent devant les carabines à plombs.


rake51

Superbement bien détaillé :good:


Je me permet de compléter ton dernier post de quelques vidéos d'une sortie avec mon fils dimanche dernier sur cette portion du fleuve:


https://youtu.be/SFJbOkoltSg


https://youtu.be/a556CFWsRxs


samy

Bien sympathique cette sortie avec ton fiston ! Ca mordait ?  :D

rake51


denali73

Waouh Yves , il file vite le Grégoire sur la seconde vidéo  :good:

samy

Citation de: rake51 le 10 Mai  2018, 10:49:46
non rien du tout... :'(


C'est aussi ce que m'ont dit tous les pêcheurs, sans exception, que j'ai croisés pendant ces deux jours...

samy

Solel... picnic... séchage des affaires... calme...regarder l'eau passer... regarder le temps passer... et se remettre en route, quand même, il faut y penser, car je ne voudrais quand même pas faire attendre ma charmante taxi-navette-kayak à Chanaz !


Remise en mode "glisse sur l'eau" à 14h15. Cétait une pause royale !
Dans ses grandes courbes et ses rétrécissements, le vieux Rhône, aussi vieux soit-il, est encore bien véloce, le bougre. Il est joueur et se laisse facilement naviguer. C'est un régal, et toujours sous un franc soleil. La crème solaire est de rigueur depuis 2 jours d'ailleurs.
Encore une ou deux petite courbe et le voilà qu'il file presque tout droit retrouver son compère canalisé, un peu avant le Pont de la Loi.


Sur les panneaux, à la jonction, en se retournant, on voit clairement le côté réservé à la navigation fluviale à moteur, et l'autre, le vieux Rhône, réservée aux pratiquant tels que nous.


Les 4 arches du pont de la Loi enjambent majestueusement le Rhône qui vient tout juste de se remarier, quelques centaines de mètres en amont et scelle ainsi leur union. Le courant forcit, ça avance tout seul, le pont arrive vite.


Le pont ferroviaire de Vions ne se fait pas attendre non plus, l'atteindre ne demande guère d'efforts avec le courant. Au moment où j'arrive, un train me grille la priorité.

samy

Une petite vue aval du pont ferroviaire de Vions en passant... il s'éloigne bien vite...


Le Rhône est devenu très large, et prends mieux son statut de fleuve. Pas de remous, il avance, droit dans ses bottes, enfin, droit dans son lit.


Après 2 jours sur l'eau, je croise enfin le seul et unique bateaux de mon périple : la bateau touristique qui fait la navette dans le canal de Savières et sur le Rhône. Je ne peux pas dire que j'ai été beaucoup dérangé par le trafic fluvial.


Un peu avant la cale à bateau de Savières, le Rhône a pris la consistance d'un lac, il est calme, pas un souffle de vent, l'eau ne présente presque pas de rides.


Comme pour me dire au revoir (et je l'espère à bientôt, "l'invincygne armada" vient me saluer en remontant le courant à faible distance de ma petite embarcation. Ils sont en groupe, en balade. Le spectacle est sympathique juste avant d'arriver à la cale...


samy

Photo 1 :  un barrage de cygnes (la CNR n'en fait pourtant pas mention)


L'arrivée à la cale à bateaux (qui sera aussi ma cale à kayak...) est en vue, juste quelques mètres avant l'écluse du Canal de Savières. Elle marque pour cette fois la fin du petit périple. La suite devra encore attendre un peu.


Dernière sortie de l'eau, dernier montage du chariot, dernières manoeuvres, dernier portage. Et dernier regard sur le Rhône, fidèle compagnon de voyage que j'ai suivi pendant ces deux jours. La terre ferme ne me manquait pas du tout.


samy

Il est 15h30 lorsque je retrouve la terre ferme. Une petite étape de 20 kilomètres aujourd'hui.
Le temps est toujours ensoleillé, quoique certains nuages soient moins sympathiques que d'autres.


Je me trouve un petit coin tranquille : dégonflage, pliage et rangeage  :D  du kayak et des affaires. Un arbre bienvenu m'offre sa protection car quelques gouttes de pluie commencent à tomber. Pas bien méchant, pas beaucoup, juste un peu, cela fait du bien et rafraîchit à peine l'atmosphère.


Il est 17h lorsque je vois apparaître mon transport retour. On charge tout dans le coffre en quelques minutes. Il nous faudra un petite heure de route, en roulant très tranquille pour rejoindre l'autre véhicule stationné vers Pont Carnot. Pendant le trajet, nous essuierons quelques bonnes averses. Il était temps de sortir de l'eau !


Peu de (mauvaises) surprises sur cette portion du Haut-Rhône qui a déjà été parcourue plusieurs fois par plusieurs membres du forum. Une interrogation seulement quand à l'absence d'un quelconque aménagement d'une cale, aussi simple et succincte soit-elle, pour la mise à l'eau aval au barrage de Génissiat. Je ne parle pas du chemin d'accès qui, comme me l'a confirmé rake51, a bien été refait (c'est tout récent, cela date du début de l'année) au moins sur 1/3 du portage. La fin du chemin est moyenne tout de même, et la mise à l'eau, suivant le niveau du Rhône, peut s'avérer très hasardeuse (je dirais presque limite dangereuse) et dépourvue du moindre aménagement, si on ne tient pas compte de la présence d'un simple et unique anneau sur une dalle pour amarrer une embarcation. Il me semble qu'il y a là un petit loupé de la CNR, et j'en ignore la raison. Le reste des aménagements reste de bonne qualité (si l'on met de côté l'absence de possibilité de faire de l'eau à Génissiat alors que 2 points d'eau sont présents, mais non fonctionnels lors de mon passage).


Je valide de mon côté la possibilité de partir plusieurs jours en autonomie avec mon Yakkair HP1, pour peu que l'on emporte un matériel optimisé en terme de poids et d'encombrement. Contrairement à un rigide, la capacité d'emport n'est probablement pas énorme, mais le kayak est assez astucieusement équipé et facilement customisable pour trouver la place nécessaire au stockage de plusieurs jours de balade. Je n'ai pas encore utilisé toutes ses ressources et astuces de rangements : la poche interne sous le pont avant était vide par exemple, il me restait aussi de la place sur la pont avant et beaucoup de place sur le pont arrière. La forme en pointe à l'arrière, sous le pont avec les boudins latéraux n'est elle pas très pratique et demande un peu de faire un puzzle, je n'ai pas encore assez travaillé la question pour trouver la meilleure solution, même si 2 grands sac étanches tiennent très bien. Chose non négligeable, les sacs sont le pont arrière sont bien protégés de l'eau sous la grande toile zippée.


Le chariot : vraiment agréablement surpris. C'est un modèle basique, sans marque, prévu pour transporter une charge de 70kg, charge que je suis bien loin d'atteindre ! Cette sortie a été son baptême. Pour moins de 40€ (je l'avais trouvé en promo à l'époque), il fait très bien le job. Aussi bien sur le bitume, les chemins tortueux, les montées de trottoirs (en faisant attention) que les galets du Rhône et la vase... Pour le Yakkair, il suffit de bien écarter la sangle de manière à ce que le chariot se maintienne bien ouvert, de bien répartir le poids entre l'avant et l'arrière pour trouver au mieux son point d'équilibre, et le portage se fait sans aucune difficulté et presque sans efforts.


Ici le lien pour ceux qui seraient éventuellement intéressés par quelques photos supplémentaires de la balade (j'insère aussi ce lien dans le 1er post) :
https://www.flickr.com/photos/156445105@N04/sets/72157694841472101


Déjà impatient de repartir...

psim

Merci pour ce beau compte rendu ...on suit la progression avec plaisir.
Bon courage,
PS
JF kayak Ponant Evo./Polyform Arktika/Plasmor Belouga 1/Venture Islay 14/Dag Biwok/ Zray Tortuga 400 2021/voiles Bic/Select XTR/EastPolePaddles Isigaia Bone Edge/Werner Tybee

rake51

Ca c'est dur CR aux petits oignons :bravo:
Merci beaucoup de m'avoir fait (même si je connais bien ces lieux) voyager à nouveau sur le Rhône.
Tes photos sont magnifiques :good:  J'adore ta façon de cadrer.

bruno.peru








     Superbe CR , très belles photos , hâte de revenir cet été sur le Rhône .
Gumotex Solar et Seawave .